Quel avenir pour les associations sportives ?

Publié le 4 décembre 2014 à 12h40 dans Sport pour tous

L’Assemblée nationale a publié le rapport de la commission d’enquête « sur les difficultés du monde associatif ». Présidée par Alain Bocquet (PCF), cette commission a été créée en mai dernier et a auditionné plus de 180 personnes. Françoise Dumas (PS) en a été la rapporteure.

Le champ du rapport est vaste et varié puisqu’il englobe 1,3 million d’associations françaises, 16 millions de bénévoles, 1,8 million d’emplois, 85 Md€ de budget total… Le sport est néanmoins bien présent tout au long du rapport. Avec 317 200 associations (soit 24,1% du total), il reste le premier secteur associatif de France.

Quatre thématiques évoquées par le rapport nous apparaissent particulièrement intéressantes quant à l’avenir du secteur associatif en général et du sport en particulier.
1- Existe-t-il une crise de l’engagement bénévole ?

Pas selon le rapport de l’Assemblée nationale.

Nadia Bellaoui, présidente du Mouvement associatif, note ainsi que « le bénévolat a progressé de 3% au cours de la période 2005-2011 ». Cette hausse peut être interprétée comme un effet de rattrapage par rapport à un engagement initialement peu élevé. Elle dément en tout cas la thèse d’un individualisme croissant et incompatible avec une vie associative dynamique.

Le rapport va aussi à l’encontre d’un des lieux communs les plus répandus sur les associations sportives : leurs dirigeants seraient âgés et se renouvelleraient peu. Rien n’est plus faux.
– Seulement 46% des présidents d’associations sportives ont plus de 55 ans contre 60% en moyenne dans le champ associatif.
– 44% des présidents d’association sportives ont entre 36 et 55 ans (soit le cœur de la vie active) contre 32% en moyenne.
– 10% ont 35 ans ou moins (seules les associatives éducatives font mieux).

Loin de l’image vieillotte dans lequel on l’enferme parfois, le sport associatif reste donc attractif.

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2- L’économie de la vie associative est-elle en danger ?

Concernant les modèles économiques des associations, on découvre que celles dans le sport sont souvent plus petites : 9% seulement des structures sportives dépassent les 50 000 € de budget contre 18% dans le secteur caritatif ou 27% dans l’éducation-formation-insertion. 63% des associations sportives ont un budget inférieur à 10 000 €.

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Les associations sportives ne représentent par ailleurs que 6% de l’emploi salarié dans le monde associatif français et 4,7% de sa masse salariale.

Enfin, leurs ressources relèvent avant tout des adhésions et peu des subventions publiques (15% contre 50% pour le secteur caritatif et humanitaire).

Ces caractéristiques ne sont pas neutres dans le contexte actuel. Une dépendance réduite aux subventions est par exemple un avantage évident.

Le rapport note aussi que les associations les plus fragilisées sont celles de taille moyenne, avec des budgets entre 50 000 et 500 000 € et employant moins de 20 emplois. Elles sont à la fois trop petites pour disposer de ressources en réserve et trop grandes pour se replier sur le bénévolat. A ce titre, l’écosystème associatif du sport français offrirait de meilleures chances de résilience en temps de crise.
3- La crise accélère-t-elle l’émergence d’un nouveau modèle économique ?

Le rapport de l’Assemblée nationale constate que la crise économique conduit à approfondir des changements structurels déjà en cours. La professionnalisation des associations en est un exemple frappant. Celles-ci doivent revoir leur fonctionnement pour gérer des budgets réduits, trouver de nouveaux financements, faire face à la concurrence d’entreprises sur certaines activités, s’adapter aux attentes changeantes des Français, aux réformes de l’Etat et des collectivités, etc.

Le rapport évoque à cet égard la question du développement de leurs activités marchandes – un sujet déjà évoqué sur ce blog.

Il a le mérite de présenter sans caricature les enjeux de ce débat (très sensible politiquement) et de proposer des premières réformes simples et concrètes à mettre en œuvre (comme le relèvement du seuil actuel de non-lucrativité).

Il souligne autant les avantages pour les associations (capacité à proposer de nouveaux services aux Français, autonomisation des ressources) que les risques (fragilisation financière en cas de chute des revenus commerciaux).

Le rapport met aussi l’accent sur le rôle fondamental que doivent tenir les « têtes de réseau » (les fédérations sportives). Il les appelle à prendre davantage en main le pilotage de telles évolutions et à renforcer l’accompagnement de leurs associations.

Philippe Bana, DTN de la Fédération française de handball, déclare à ce titre : « Les fédérations sont aujourd’hui des administrations, elles doivent devenir des compagnies de services » recentrées sur des missions de formation et de professionnalisation (avec un Ministère des sports les incitant financièrement à s’engager dans une telle voie).
4- Quel sera l’impact de la réforme territoriale ?

Le rapport revient à plusieurs reprises sur la réforme territoriale en cours et les inquiétudes qu’elle suscite dans le monde associatif.

Le sport pourrait apparaître préservé des changements à venir. Il semble acquis que la clause de compétence générale sera maintenue dans son domaine et qu’il pourra donc continuer à bénéficier de financements provenant de tous les niveaux de collectivités territoriales.

Des interrogations importantes subsistent malgré tout.

Les départements existeront-ils encore partout à moyen terme ? La question n’est pas anodine pour une organisation territoriale du sport où les comités départementaux représentent historiquement un échelon important.

Quelles seront les conséquences de la montée en puissance prévue de l’intercommunalité ainsi que de la création de super-régions et de métropoles ?

Le flou qui entoure la réforme actuelle est un frein à l’évolution des acteurs associatifs. Les pouvoirs publics leur demandent, à juste titre, de décloisonner leurs actions, de mutualiser leurs moyens, de coordonner leurs efforts sur la base de projets territoriaux. Mais comment les associations peuvent-elles avancer dans ce sens alors qu’elles ne connaissent pas encore les périmètres et compétences futurs de leurs principaux partenaires ?

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