Nous poursuivons notre série d’interview des nouveaux présidents de fédération, pour connaitre leurs impressions et leurs premières mesures. Découvrir un nouveau poste, un nouvel environnement, de nouvelles responsabilités, notamment dans cette période, n’est pas simple. Nous les remercions de s’être ainsi livrés avec franchise afin que nous puisions mieux comprendre leurs premiers mois de présidence et leur vision de l’avenir du mouvement sportif français.
Après, Philippe Bana, président de la FF de handball, Yohan Penel, président de la FF badminton, Gilles Erb, président de la FF de tennis de table, nous donnons la parole à Cédric Gosse, président de la FF de triathlon.
Depuis 12 mars, cela fait trois mois que vous êtes président de la fédération française de Triathlon. Quelles ont été vos premières mesures en tant que président pour vos 100 premiers jours ?
Nous avons, avec mes équipes, rencontré l’ensemble du personnel fédéral ainsi que les cadres de la DTN pour nous présenter. Nous sommes près de 70% de nouveaux élus. Nous leur avons expliqué les grands axes de notre programme. J’ai souhaité aussi mettre en place un plan de formation pour les élus, articulés autour de thématiques très différentes, comme le budget fédéral, la direction technique nationale, le ministère des sports, les actions de développement. Près de 12 sessions ont eu lieu avec, à chaque fois, des intervenants qualifiés en interne ou externe. Cette action a été très appréciée. On pense trop souvent que parce qu’on est élu on est tout de suite opérationnel ! La formation des bénévoles, la constitution d’une équipe fédérale regroupant les élus, les cadres, les salariés de droit privé est un des axes prioritaires que je souhaite impulser.
Nous avons également engager tout une série de rencontres, réunions, concertations sur la construction du budget fédéral pour 2021. Je souhaite lancer un véritable débat budgétaire en y associant l’ensemble des acteurs, dans les ligues, les comités départementaux. Nous avons aussi lancé une consultation auprès des clubs. Nous allons devoir faire des choix et recueillir les attentes me parait important. C’est un des engagements que nous avons de consulter les acteurs sur les grandes décisions.
De plus, nous travaillons depuis l’élection à la transformation du programme pour lequel nous avons été élu en projet fédéral. Cela veut dire que, désormais en fonction, et après avoir rencontré nos partenaires institutionnels (ministres, directeur des sports, CNOSF, ANS…), après avoir échangé avec notre direction technique pour leur demander leur expertise, après avoir créer nos commissions, il nous faut affirmer des choix, écrire les lettres de mission, définir la méthode collectivement. Cette action est importante car elle remobilise l’ensemble des acteurs de notre fédération autour des engagements que nous avons pris, des propositions faites pour les rendre réels maintenant, inscrit dans la durée du mandat avec des indicateurs de performance.
Enfin, nous avons conforté certains de nos partenariats.
On sent que vous avez voulu d’entrée montrer votre ouverture. Des choses vous ont-elles surprises, en positif comme en négatif ?
Je n’ai pas eu vraiment de surprise. Je retiens quand même quelques points comme le lancement d’une nouvelle dynamique, l’envie de travailler ensemble de l’équipe fédérale, l’attente de nos clubs et de nos licenciés.
Je m’étais préparé à la charge de travail et je confirme que l’intensité de la fonction est bien là, mais c’est passionnant. Cet engagement nécessaire, l’attente de nos clubs et licenciés.
En revanche, la demande institutionnelle m’interroge quand même sur le statut des présidents de fédérations pour qu’ils puissent véritablement se consacrer à leur tâche. Il y a là un vrai sujet et une fédération seule ne peut y répondre surtout dans un pays qui se prépare à accueillir les Jeux et qui a engagé une réforme de la gouvernance du sport.
Si nous vous interrogeons dans un an sur le bilan de votre 1° année de mandat, qu’aimeriez-vous pouvoir nous répondre ?
J’aimerai d’abord vous dire que la crise est derrière nous et que ce n’est plus qu’un mauvais souvenir. J’espère vous dire également que nous avons retrouvé notre activité pleinement : activité de nos clubs, de nos organisateurs, que nos bénévoles ont retrouvé la motivation et le goût de l’engagement.
j’aimerai aussi vous dire que les 3 piliers du projet fédéral que nous portons sont bien en place avec des concrétisations dans les territoires, dans une dynamique de construction de l’héritage Paris 2024. Je vous les rappelle:
– Renforcer la dynamique de service et de proximité avec les clubs, les organisateurs
– Innovation et créativité au coeur du projet associatif
– Maintenir un niveau de performance élevé.
C’est tout le sens de notre action en ce moment, ou nous travaillons à transformer le programme sur lequel nous avons été élu en projet fédéral. C’est à dire un projet partagé avec des choix affirmés où la fédération s’engage dans sa mission de développement du triathlon et des disciplines enchainées mais également dans son impact social dans le portage et la déclinaison de politiques publiques.
Enfin, j’aimerai vous exprimer toute ma joie sur les médailles obtenues au JOP de Tokyo en triathlon et paratriathlon. Nous avons une belle équipe de france, performante avec des athlètes au plus haut-niveau mondial.
Selon vous, quels sont les principaux défis auxquels vont être confrontés votre fédération et le mouvement sportif ces prochaines années ?
Le premier défi à mon sens est d’abord de tirer des enseignements de cette crise que nous avons connu. Durant cette période et avec le confinement nous vivons une expérience de renoncement. On goutte à l’essentiel, l’autolimitation, l’humilité et cela aura des conséquences pour l’avenir. De nombreuses personnes se sont remises au sport, chacun de son côté, avec ses moyens.
Cette crise a permis de prendre conscience du sport dans nos vies : vecteur de lien social, de santé, de bien-être. L’idéologie de la compétition, moyen unique de faire du sport, est en train de mourir et cette crise va accélérer à mon sens cette orientation. je pense donc, qu’en tant qu’acteur du sport, nous devons en tirer des conséquences. Lors de cette sortie de crise que j’espère prochaine, il nous faudra refaire société. Et le sport en est un formidable moyen. Saisissons cette opportunité. Proposons des offres de pratique diversifiées, adaptées, avec du service. Il y a une opportunité et il nous faut la saisir en agissant aussi avec plus de proximité, en associant les acteurs locaux.
Dans ce cadre, nous allons lancer les conférences territoriales du triathlon afin d’établir des schémas territoriaux de la pratique. Autour de la table, je souhaite réunir le président de la ligue avec ses présidents de comités départementaux et les collectivités (départements, régions) avec des questions majeures : comment nous nous organisons pour mailler le territoire, se répartir les rôles, optimiser le financement, renforcer l’impact social de nos actions.
D’autres défis nous attendent également : le renouvellement des modèles économiques pour diversifier nos sources de revenus.
La révolution numérique et l’engagement de nos fédérations dans le digital est aussi un défi majeur. L’enjeu sera de prendre ce virage pour plus de simplification de l’expérience sportive, apporter du service, accompagnement, conseil. Mais pour réussir, il nous faudra penser « utilisateur » (du licencié au non licencié). Et il nous faudra aussi ne jamais oublier à mon sens que le digital reste un outil complémentaire et pas exclusif.
Enfin, nous avons un défi à court terme : la construction de l’héritage des Jeux de Paris 2024. Et chaque fédération ne peut pas le construire de son coté ! Cela n’aurait pas de sens. Il nous faut collectivement au sein du CNOSF, travailler et engager cette réflexion commune, définir une stratégie. Je parle du CNOSF car Paris 2024 va être de plus en plus pris par la livraison des Jeux. Ils ont lancé des axes sur le sujet mais maintenant c’est au mouvement sportif de s’unir sur ce sujet.
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