Un jour aux Jeux avec Alain Lunzenfichter

Publié le 10 janvier 2024 à 10h01 dans Un jour aux Jeux

Pour cette nouvelle série d’articles, nous avons demandé à différentes personnalités du sport (journalistes, athlètes, dirigeants de fédération, anciens ministres, membres de cabinet ministériel, professionnels du sport…) de nous partager une anecdote, une histoire, une émotion qu’ils ont vécue à l’occasion d’une édition des Jeux Olympiques ou des Jeux Paralympiques à laquelle ils ont participé. Ainsi, jusqu’aux Jeux, nous vous en dévoilerons un chaque mercredi matin. Nous commençons avec Alain Lunzenfichter, ancien rédacteur en chef adjoint de L’Équipe de 1975 à 2013, notamment en charge de l’olympisme. En 2006, il devient le président de l’Association mondiale des journalistes olympiques puis en devient président d’honneur en 2014.

                                                             Je voulais être Abebe Bikila…. 

« Les Jeux olympiques de Paris seront ma 26e participation aux Jeux Olympiques (été et hiver bien sûr) et même la 30e, si l’on y ajoute mes quatre présences aux Jeux de la Jeunesse. Pourtant, c’est ma présence aux Jeux de Rome de 1960, mes premiers, qui reste bien présente dans ma mémoire. C’est comme si c’était hier. A onze ans, j’avais, durant des mois, demandé à mon père d’aller aux Jeux Olympiques. Comme c’était en Italie, pas trop loin de Paris, il a fini par céder et nous voilà dans le train à destination de la capitale italienne. A la mi-août, la température est caniculaire et, chaque jour, je fais la course aux billets pour les épreuves d’athlétisme, c’est bien moins cher qu’aujourd’hui et, parfois, même je me faufile pour entrer gratis dans le stade olympique. Il est vrai que la sécurité était bien plus élastique qu’aujourd’hui. Je ne rate pratiquement aucune épreuve et le Foro Italico n’a plus aucun secret pour moi et, surtout, je découvre en chair en os des athlètes que je n’avais vu qu’en photo dans le journal L’Equipe que mon père achetait chaque matin. Armin Hary, Wilma Rudolph, Al Oerter, Valery Brumel ou encore Michel Jazy enchantèrent mes journées olympiques.

Rome (Italie), le 10 septembre 1960. Dans les deux derniers kilomètres de la course, Abebe Bikila (pieds nus) dépasse le Marocain Abdeslam Radi, grand favori. Keystone France

Pourtant, celui qui m’a marqué est un frêle coureur aux pieds nus : Abebe Bikila.  Personne ne le connaissait, même pas les journalistes spécialisés, car il n’était jamais sorti de son Ethiopie natale. En fait, de sa foulée souple, il n’a aucun problème pour lâcher le Marocain Radi dans les derniers hectomètres et devenir le premier noir africain à gagner l’or. J’ai encore en mémoire cet athlète au maillot vert au short rouge qui n’est apparu dans les phares des voitures à l’arrivée sous l’arche de Constantin. A mon retour de Rome, j’ai dit à mon père « Je veux être le nouveau Abeba Bikila » mais, las, après trois mois d’entrainement j’ai vite compris que je ne serais pas le nouveau Bikila. »

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