Avenir du sport pro : le Sénat s’interroge

Publié le 5 février 2014 à 15h48 dans Sport pro

La chaine Public Sénat diffusait hier une table ronde organisée le 29 janvier dernier par la Mission d’information commune du Sénat sur le sport professionnel et les collectivités territoriales. Les cinq principales ligues professionnelles françaises avaient été conviées : football, rugby, basketball, handball et volleyball.

La Mission du Sénat, qui a débuté en octobre 2013, doit permettre de clarifier le rôle des collectivités territoriales dans les politiques de soutien aux clubs professionnels. Son rapporteur est Stéphane Mazars, Sénateur de l’Aveyron.

Les relations entre collectivités et clubs professionnels ont déjà été largement auscultées par la Cour des comptes en 2009, mais la Mission sénatoriale promet d’apporter un regard plus politique sur le sujet. On pouvait cependant aussi craindre quelques effets de manche démagogiques accompagnés d’une remise en cause des aides publiques destinées aux clubs professionnels.

Que nenni ! Les questions et remarques des Sénateurs ont au contraire exprimé le besoin d’optimiser les aides actuelles et d’en faire des investissements « durables » au service des clubs professionnels.

A ce titre, la Mission d’information a longuement « cuisiné » les représentants des ligues professionnelles sur la possibilité de rationaliser leurs championnats afin de réduire l’aléa sportif (relégations en division inférieure) et de sécuriser les investissements des collectivités dans leurs clubs. Les (mauvais) exemples des stades du Mans et de Grenoble, financés par les collectivités pour des clubs aujourd’hui en chute libre, ont été mentionnés à plusieurs reprises.

Toutes les ligues ont déclaré avoir déjà planché sur une « fermeture » partielle de leur championnat, directement (réduction du nombre de relégations chaque année) ou indirectement (augmentation de l’indemnité attribuée aux clubs relégués afin de les aider à remonter rapidement). Le basketball a aussi rappelé son système de wild cards, qui donne un accès privilégié à l’élite pour des clubs structurés et implantés dans de grands bassins de population.

Les Sénateurs n’ont pas semblé très convaincus par ces dispositifs, qui favorisent certains clubs mais n’apportent pas de vraie sécurité économique. Une relégation sportive y reste toujours une possibilité, même réduite, avec de forts effets négatifs pour la collectivité (club en difficulté financière, enceinte surdimensionnée pour des matches de division inférieure, etc.).

Logiquement, l’hypothèse de la création de ligues fermées a été discutée. Le football et le rugby l’ont clairement rejetée, qualifiant le concept d’« inacceptable » ou « pas adapté ». Les termes furent moins tranchés pour le basketball et le handball.

On retrouve ici un des grands dilemmes du sport professionnel français. Le besoin de sécurité économique est réel aussi bien pour les clubs que leurs financeurs (dont les collectivités. Les championnats « ouverts » comportent sur ce point trop d’aléas. Les ligues fermées sont plus avantageuses mais provoquent des réticences culturelles quasi instantanées. Et les dispositifs intermédiaires (diminution du nombre de relégations, wild cards…) ne sont que des demi-mesures à l’impact limité et sans cohérence globale (comme l’a souligné Etienne Capon, Directeur général de la Ligue nationale de handball).

Ce souhait de rationalisation économique des Sénateurs s’est également retrouvé dans les discussions concernant la répartition géographique des clubs professionnels français.

Jean-Jacques Lozach, Sénateur de la Creuse, a ainsi évoqué la possibilité de voir la dizaine de métropoles instituées par la loi du 27 janvier 2014 (Paris, Lyon, Marseille, Toulouse, Lille, Bordeaux, Nantes, Strasbourg, Rennes, Rouen, Grenoble, Montpellier, Brest et Nice) devenir les futurs pivots des sports professionnels français.

Dominique Juillot, Vice-président de la Ligue nationale de basketball, a abondé dans ce sens en soulignant que seules ces métropoles seraient bientôt capables de faire vivre des clubs concurrents en leur sein. Les autres villes françaises devront pour leur part faire des choix et mutualiser leurs moyens avec des collectivités voisines (plutôt que de s’épuiser à se concurrencer mutuellement). Il s’agira pour elles de sortir d’une logique purement sportive et d’accepter de fusionner des clubs sur des critères avant tout politiques et économiques.

Le monde sportif est-il prêt à franchir le pas ?

On remarquera que les équipes de Reims et Châlons-en-Champagne l’ont déjà fait, avec succès, en basketball.

Les élus locaux pourraient aussi avoir un rôle déterminant dans cette évolution. La Mission du Sénat a souligné que les collectivités devraient connaître de profonds bouleversements ces prochaines années, que ce soit par le biais de contraintes budgétaires croissantes ou de la future loi de décentralisation (qui pourrait revenir sur la clause de compétence générale et donc réduire le nombre de collectivités pouvant financer le sport). Les dommages collatéraux seraient considérables pour les clubs professionnels. Suffisamment pour conduire à un changement d’organisation de leurs championnats ?

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